Les étapes dans l’écriture du projet de loi PACTE

Le Plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises,  ou projet de loi PACTE, a été annoncé avec la volonté de relancer la croissance de l’économie en relançant celle des entreprises. Amorcé le 23 octobre 2017 et déposé le 20 juin 2018 par Bruno Lemaire, ministre de l’économie et des finances, ce PACTE a été élaboré en plusieurs étapes et en suivant une démarche de démocratie ouverte. Originaire d’Outre-Atlantique, elle a pour principes la transparence dans l’utilisation des données publiques, la participation citoyenne et la collaboration avec les composantes de la société civile.

En première instance, sont consultées les sociétés civiles et commerciales. Cinq binômes et un trinôme (député/chef d’entreprise) sont constitués pour rencontrer 626 institutions et acteurs économiques et sociaux. Les conclusions de ces échanges donnent lieu à un premier rapport, rendu publique le 21 décembre 2017, constatant des situations problématiques et en préconisant des solutions. En deuxième instance, une consultation citoyenne s’opère entre le 23 janvier et le 10 février 2018, via une plateforme dédiée et gérée par Cap Collectif, association dont l’objet est de promouvoir la démocratie ouverte. On y compte 7756 participants pour 2489 propositions dont 31 faites par le gouvernement, reprenant certaines prononcées en première consultation. À cela s’ajoute le traditionnel rapport d’expertise. Celui-ci est mandaté à Nicole Notat, ex-présidente de la CFDT et fondatrice de la société Evolia ; et Jean-Dominique Senard, président du groupe Michelin qui le remette le 9 mars 2018. Axé sur la question de l’objet social de l’entreprise, ce rapport conseille une modification des articles 1832 et 1833 du Code Civil pour y intégrer des objectifs autre qu’économique (mais aussi social et environnemental) et garantir une gouvernance plus horizontale et intégrants toutes les parties-prenantes de l’entreprise.

Le projet de loi

Le 19 juin 2018 est alors déposé à l’Assemblée Nationale, le projet de loi n°1088 relatif à la croissance et la transformation des entreprises. D’une teneur de 73 article, le projet s’accompagne d’une étude d’impact de 722 pages. Lourd et peu accessible, du fait de son jargon juridique, deux livrets sont alors rédigés à destination du grand public : l’un énonçant de manière abrégée ses dix principales mesures ; l’autre, plus complet, les détaillant une à une.

1. Suppression de certains seuils d’effectifs applicables aux PME avec préservation des tranches 11, 50 et 250 salariés et un délai de cinq ans consécutifs pour avoir rendre opératoires les obligations dues à un changement d’effectifs. 2. Suppression, pour les entreprises de moins de 250 salariés, du forfait social. Contribution à charge de l’employeur sur les rémunérations ou gains exonérées de cotisations sociales dont la suppression a pour but d’inciter les entreprises à mettre en place un accord de participation et d’intéressement ou un plan d’épargne-salarial. 3. Modification des articles 1833 et 1835 du Code Civil en vue de prendre en compte les enjeux sociaux et environnementaux des entreprises et les inscrire dans l’objet social de l’entreprise ; et de définir une raison d’être de l’entreprise en vue de lui donner des lignes directives répondant à un intérêt collectif.  4. Création d’une entreprise en ligne et à moindre coût, impliquant le remplacement des sept réseaux de formalités des entreprises par une plateforme unique et en ligne, avec le maintien d’une assistance physique ; un rapprochement des différents registres (des métiers, du commerce et des sociétés) ; la dispense du stage de préparation à l’installation (actuellement obligatoire pour les artisans). 5. Encouragement des entrepreneurs à reprendre une activité entrepreneuriale lorsque celle-ci échoue. Cela passe par une réduction des délais et des coûts des procédures de liquidation judiciaire (de 2 ans et demi à un an et demi maximum) et un effacement des dettes des entreprise sans salariés détenant moins de 5 000 € d’actifs. 6. Encouragement des chercheurs du publique à créer une entreprise : par la simplification des autorisations de cette double activité, par l’accroissement à 50% du temps accordé à une direction scientifique d’entreprise (contre 20% aujourd’hui) et par la possibilité de garder une part du capital de l’entreprise, une fois celle-ci cédée. 7. Simplification des procédures de transmission d’entreprise : par la rénovation du Plan Dutreil (exonération de frais de transmission sous condition), par la possibilité d’une reprise par les salariés et par la création d’une dispositif de crédit-vendeur pour les petites entreprises. 8. Simplification des produits épargne-retraite qui en compte actuellement quatre avec : d’une part, la possibilité de transférer l’épargne d’un produit à l’autre et d’obtenir une déduction fiscale des versements volontaires effectués ; d’autre part, la possibilité de libérer le capital épargné en vue de changer de prestataire et permettre ainsi une concurrence entre ces derniers. 9. Accompagnement et encouragement des PME à l’export. Ce qui se matérialise par la création d’un guichet unique et régional adjointe d’une plateforme numérique ; par une amélioration du mode de gouvernance de Business France ; et par la définition de BPI France comme unique interlocuteur pour le financement des projet internationaux ; et enfin, par une diffusion de la culture de l’export afin de la promouvoir. 10. Protection des entreprises stratégique en renforçant la procédure d’autorisation préalable d’investissements étrangers en France ; ce qui signifie, élargir la liste des secteurs protégés, renforcer les pouvoirs de sanction du ministre de l’économie et des Finances et faciliter la circulation d’information entre les investisseurs et les entreprises pour contrôler la véracité des autorisations préalables.

Outre ces 10 mesures, le projet de loi propose la création étatique d’un compte d’épargne alimenté par la cession de participations publiques, c’est-à-dire la privation du groupe ADP, de la Française des Jeux et la suppression des capitaux détenus sur ENGIE (tout en maintenant une participation minimum).

Procédure de discussion de la loi jusqu’à adoption

Déposer un projet de loi en procédure accéléré, comme c’est le cas ici, signifie que, dans le cas où, suite à une première lecture dans chacune des deux assemblées du Parlement n’aboutirait pas à l’adoption du projet, une Commission mixte paritaire se réunit alors pour tenter d’établir un texte commun. Ainsi, l’Assemblée Nationale qui a adopté en première lecture, le 9 octobre 2018, le projet de loi l’a envoyé au lendemain au Sénat qui l’a refusé en l’état. Ainsi le 12 février, suite à la commission mixte paritaire qui s’est soldé par un échec, le Sénat renvoie un projet de loi amandé pour une nouvelle lecture à l’Assemblée Nationale. Deux propositions importantes ont par exemple été rejeté par le Sénat : les privatisations ainsi que l’inscription d’un objet social de l’entreprise dans ces statuts. Il faut à présent attendre les échanges prévus tout au long de la semaine du 4 au 8 mars pour connaître les issus possibles du projet en une loi et son application, qui se déroulerait idéalement en avril aux yeux de Roland Lescure, président de la commission des affaires économiques au gouvernement.

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